16 novembre 2013

Nouvelle éruption sur l'Etna

Tout au long de la journée  le NCSE a été le siège d'une activité très modeste, faite surtout de bouffées cendreuses.
Mais depuis le tout début de nuit, l'activité monte en puissance, conjointement avec une hausse assez forte du trémor, comme à l'accoutumée.


L'activité en journée et en début de nuit. Images: Radiostudio 7, inconnu pour Bronte, Etnaweb

Inutile de préciser que la situation est à suivre de près! J'utiliserais ce post pour des mises jour éventuelles.

MàJ: rapport préliminaire (toutes les heures sont locales)

Ce nouveau paroxysme s'est largement démarqué de ses nombreux prédécesseurs par l'absence de fontaine de lave. L'activité n'a cessé de croitre en intensité jusqu'à 02h00 du matin environ, moment le trémor atteint son maximum d'intensité.

Pic de trémor lié au 16ème paroxysme de l'Etna, les 16-17 novembre-2013. Image : INGV

1- activité explosive
Mais cette activité est restée à un stade de "fontaine avortée", la remonté de gaz se faisant sur un mode essentiellement discontinu (remontée de bulles séparées) alternant parfois avec de courtes phases continues (début de fontaines). Le pic de trémor est pourtant tout à fait similaire, en intensité, à celui du paroxysme précédent ce qui signifie que l'activité éruptive a été aussi intense. La différence au niveau du déroulement pourrait, par exemple,être liée au fait que le conduit éruptif a changé de morphologie (un conduit plus large défavorise la mise en place d'une fontaine) car une sortie aussi rapide et répétitive de lave peut fortement éroder les conduits magmatiques.
Pour en revenir à ce qui s'est passé cette nuit, le spectacle a donc été largement dominé par un immense brassage de lave, le sommet du NCSE giclant à tout va des fragments de lave qui se sont accumulés rapidement et, surtout, à haute température (détail important comme vous pourrez le voir par la suite). Les moments peut-être les plus impressionnants furent marqués par l'éclatement d'immenses bulles de gaz. Pour les webcams, l'une des plus esthétiques s'est produite à 02h07 projetant des bombes à plusieurs centaines de mètres de hauteur, qui ont recouvert la totalité du
NCSE (et au delà puisque certaines bombes semblent être retombées à environ 600 m de distance) de fragments incandescents.

Explosion d'une bulle de gaz sur le volcan Etna, 17 novembre 2013
Explosion d'une bulle de gaz. Images : Etnatrekking et Radiostudio7

Point de véritable fontaine, qui résulte de la mise en place d'un jet de gaz continu et relativement stable, pour ce 16ème paroxysme bien que certaines phases du brassage aient pu constituer des amorces de fontaine.

2- activité effusive

Comme pour les précédents paroxysmes, celui-ci à vu la mise en place de coulées, au nombre de quatre: l'une au sud, 2 à l'est et la quatrième au nord-est.
 
Les coulées rhéomorphiques du paroxysme du 16-17 novembre 2013. Le flêche indique le nord. Images: Etnatrekking/Radiostudio7/Etnaweb

Coulée sud: elle démarre au niveau du col entre les les cônes Sud-Est vers 00h10, direction sud-ouest. Progressant très lentement, elle n'arrive au pied du cône qu'à 01h13 (vitesse de progression: 5km/h environ) et, à partir de ce moment, bifurque vers l'est (direction Valle del Bove). Là, elle poursuit sa route tout en ralentissant et arrive péniblement à parcourir 400 m de plus pour finalement s'arrêter vers 02h40.

Le départ et l'arrivée de la coulée sud. Images: Radiostusio7

Coulée est-1 : ce n'est pas une coulée comme les autres. Les "vraies" coulées de lave se produisent lorsque le magma est assez liquide pour couler directement depuis son point de sortie. Mais un type de coulée appelé "spatter-fed lava flow" (coulées de lave issues d'éclaboussures) chez les anglo-saxonsse et "coulée rhéomorphique" (moins drôle) chez nous, se forme lorsqu'une grande quantité de lave projetée (bombes) retombe et s'accumule à très haute température. Ces fragments sont donc solides mais ductiles (=déformables, comme de la pâte à modeler). Lorque le poids de fragments accumulé est trop grand, c'est toute une partie du cône qui se met ainsi à re-couler, formant une coulée rhéomorphique. Et je dois dire que cette éruption en montre trois très beaux exemples, qui sont les coulées est-1 est-2 et nord-est. 
 
Pour ce qui est de la coulée est-1, elle entame sa formation depuis le haut du NCSE vers 02h00 environ (c'est très progressif) et avance lentement puisqu'à 04h20 elle n'a toujours pas atteint le bas du cône. Mais à ce moment-là un débordement venant du sommet lui donne un "gros coup de fouet" qui lui permet d'arriver au pieds du cône: il est 05h46 quand elle atteint son extension maximale (600, peut-être 700 mètres). Mais le paroxysme étant alors fini, elle ralentie.

Etapes de la progression de la coulée rhéomorphique est-1. Images : Etnatreking/Etnaweb


Coulée est-2: Il s'agit aussi d'une coulée rhéomorphique, voisine de la coulée est-1, mais bien plus tardive puisqu'elle entame sa formation à 05h51 alors que la coulée est-1 est en train de s'arrêter. Le plus impressionnant avec cette coulée est-2 est qu'elle prend naissance au milieu du cône, sans le moindre évent, ce qui se voit particulièrement bien sur les images de la webcam de Nunziata. Elle ne progresse que très peu avant de s'arrêter puisqu'elle débute alors même que l'activité a déjà largement décliné en intensité.

Etapes de la formation de la coulée rhéomorphique est-2. Images: Etnaweb

Coulée nord-est: je devrais plutôt l'appeler coulée nord nord-est en réalité. C'est aussi une coulée rhéomorphique particulièrement visible depuis les webcams du Pizzi di Neri et Nunziata. Elle amorce sa formation à 03h19 sur la partie haute du NCSE et progresse, elle-aussi, très lentement. Elle arrive à la base du NCSE vers 03h46 (la distance est courte) puis commence à bifurquer vers l'est tout en ralentissant sa progression (pas facile d'avancer sur une pente douce...). Vers 05h40, elle s'arrête.

Etapes de la formation de la coulée rhéomorphique nord-est. Images :Etnatrekking/Etnaweb

MàJ: l'éruption vue de l'espace par le satellite Meteosat. On distingue nettement, sur les canaux infrarouge, l'anomalie thermique et le panache produit par l'éruption. Sur l'image ce dernier s'étend sur environ 200 km à l'est.

Image satellite du paroxysme du 16-17 novembre 2013. Image: Eumetsat
La direction qu'à prise le panache explique sur les images produites par la webcam de Giarre (à l'est du volcan) on a l'impression d'avoir une immense colonne de cendres: en réalité, le panache n'a pas été particulièrement important  mais avec l'effet de perspective on a l'impression qu'il est immense et imposant.
Ce panache semble avoir été composé essentiellement de gaz. C'est ce que laissent supposer en tout cas les images thermiques prise par l'INGV depuis Nicolosi: le panache n'y apparait pas très dense mais, surtout, il perd rapidement sa température en s'élevant (les cendres restent chaudes un peu plus longtemps). Plus simplement: le panache est passé au-dessus de Giarre mais aucune cendres n'est déposé sur la ville (le boitier en premier plan de la webcam est resté parfaitement propre).


Baisse de température dans le panache. Image: INGV
Le panache vu du puis Giarre. Image: Ville de Giarre

MàJ
Pour pouvoir illustrer le rapport ci-dessus, j'ai créé une série de Time-lapses à l'aide des webcams. Les vidéos, qui sont sur le Canal Volcan, sont annotées en vue de faire le lien avec le rapport. 
La première d'entre elles a été faite à l'aides des images prises depuis le Pizzi Di Neri. Elle montre bien la mise en place de la coulée rhéomorphique nord-est.





La seconde a été faite grâce aux images prises depuis la Montagnola. Elle permet de voir la mise en place des coulées sud et est-1.





La troisième se base sur les images prise par webcam installée sur la Schiena dell'Asino. elle permet de voir les coulées sud et est-1 se mettre en place.

Enfin, quatrième a été réalisée à partir des images prises depuis la petite ville de Nunziata, à l'est de l'Etna. Elle permet de voir la mise en place de toutes les coulées de ce paroxysme dans leur chronologie (Images : Etnaweb).




Et pour finir, une vidéo faite sur place par Volcanodiscovery, avec le son!



Sources : Etnatrekking, Inconnu (webcam Nunziata), INGV, Radiostudio7; Commune de Giarre; Volcanodiscovery

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