7 décembre 2016

Ca bouge un peu sur les volcans Cayambe et Nyamulagira

Cayambe, Equateur, 5790 m

Depuis le mois de juin les volcanologues de l'Institut de Géophysique d'Equateur enregistrent sur cet édifice, le troisième plus proche de l'Equateur (après Wolf et Ecuador aux Galapagos), des modifications importantes et très surveillées de sa sismicité.

Tout commence le 05 juin par une hausse progressive de la sismicité formant ce que l'on appelle un essaim qui va durer tout le mois et compte quelques 2300 secousses. Elles sont essentiellement d'origine "volcano-tectoniques" (VT), c'est-à-dire dues à la fracturation des roches sous l'effet d'une contrainte mécanique ( due à une pression par exemple). L'essaim en question est évidemment suivi de près mais il se localise au nord-est du volcan. Puis le calme revient....jusqu'en septembre.

L'essaim de séismes du mois de juin. Image: IGEPN
De nouveau des secousses font alors leur apparition sur les sismomètres et, là encore, elles sont essentiellement VT. Mais cette fois elles se produisent sous le stratovolcan et elles ne forment pas un mais une succession d'essaims, qui se poursuivent actuellement. D'autres secousses montrent par ailleurs une tendance à la hausse, même si elle est légère: les secousses dites 'longue période' (LP), qui sont dues à la circulation de fluides.

Localisation des secousses en juin (turquoise) et depuis septembre (jaune). Image: IGEPN
En plus de ces données purement géophysiques, plusieurs témoignages de personnes ayant fait l'ascension concordent sur un point: une odeur de soufre assez forte règne au sommet, ce qui a même provoqué des maux de tête et des vomissements chez certains. Il semble donc qu'une partie des fluides qui circulent dans les conduits trouvent déjà une voie de sortie. En conséquence les volcanologues ont installé un DOAS, appareil en charge d'estimer la concentration en dioxyde de Soufre et son évolution. 
En conséquence des l'ensemble de ces données, les volcanologues ne peuvent pas écarter l'hypothèse d'une intrusion magmatique de faible volume, qui pourrait perturber le système hydrothermal du volcan. Pour la suite, soit cette intrusion aboutit à une éruption (et les volcanologues s'attendent pour le moment plutôt à une activité faible à modérée type Cotopaxi 2015 si l'activité interne reste similaire à celle en cours) soit la situation se calme progressivement. 

Le volcan Cayambe et son imposante masse. Image: auteur inconnu, via El comercio
Cette dernière n'est donc pas du tout critique mais parait assez sérieuse pour justifier une surveillance accrue. La dernière éruption, modérée, remonte à la fin du 18ème siècle (1785-1786) mais son histoire éruptive  récente (dernières 5000 années) a permis de mettre en évidence des dépôts laissés par des éruptions plus violentes, avec formation de dômes, leurs effondrements et les écoulements pyroclastiques associés. Par ailleurs la présence d'une calotte de neige au sommet s'accompagne du risque de mise en place de lahars (coulées de boue) importants.

Source: IGEPN; El Comercio

Nyamulagira, République Démocratique du Congo, 3058 m

Après la disparition du lac de lave courant avril de cette année, et une réapparition courant juin à priori, il avait de nouveau disparu. Mais il n'est pas impossible qu'une activité soit de retour depuis fin novembre. Pour le moment rien n'est sûr et il s'agit plus de soupçons, mais le MODVOLC et le MIROVA ont détectés des signaux thermiques un peu plus nombreux et intenses qu'au cours des semaines précédentes sur ce volcan.

Signaux thermiques sur le Nyamulagira, le 27 novembre 2016. Image: MODVOLC

En rouge, les signaux thermiques repérés ces derniers jours sur le Nyamulagira (notez l'énorme source thermique en bas à droite: c'est le lac de lave du Nyiragongo). Image: MIROVA

Une image haute résolution, par temps dégagé, réalisée le 29 novembre à partir des données du satellite SENTINEL 2, intégrant les données thermiques ne montrait pourtant pas d'anomalie au niveau du pit crater où se trouvait le lac jusqu'en avril. Cependant cela n'implique pas de facto l'absence d'une activité car la détection depuis l’espace de ces rayonnements est aussi dépendante de la configuration du cratère. Plus il est profond et étroit et plus le rayonnement qui s'échappe est faible. Or c'est justement le cas du pit crater actif du Nyamulagira.

Image haute résolution prise le 29 novembre 2016. Image: Sentinel 2/ESA-Copernicus.

Pour l'heure il n'y a donc pas de confirmation de la présence d'une activité éruptive sur ce volcan, mais à minima la présence de ces quelques signaux indique qu'il vaut mieux rester branchés.

Sources: MR4G, un lecteur que je remercie chaleureusement; MODVOLC; MIROVA; Sentinel2/ESA-Copernicus

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