5 février 2017

Le point sur l'activité des volcans Pacaya (mis à jour), Kilauea et Cleveland

Cleveland, Etats-Unis, 1730 m

L'AVO a préféré élever le niveau d'alerte aviation à l'orange aux environs du Cleveland le 03 février, non en raison d'une activité explosive en cours, mais en prévision qu'un telle activité ne démarre.

Les volcanologues américains ne s'attendent pas particulièrement à une activité explosive intense, mais la présence d'un petit dôme de lave, similaire à ceux observés au cours des dernières années, dans le petit cratère sommital de ce stratovolcan leur permet de penser que des explosions modérées peuvent se produire à tout moment.
De tels dômes empêchent en effet l'échappement des gaz contenus dans la colonne de magma et la pression ainsi générée se libère en détruisant tout ou partie du dôme. Le même type de situation se rencontre au Popocatepetl aussi, par exemple.
Généralement, en ce qui concerne le Cleveland, ces phases d'activité explosive sont très brèves et ne comptent que très peu d'explosions. 

Un signal thermique est détecté début janvier dans le cratère sommital du Cleveland par les capteurs du LANDSAT 8. Image: données: NASA/USGS, composition: annotations: Culture Volcan

Le bulletin de l'AVO n'indique pas (car ce n'est pas évident de le savoir sans faire des observations directes, fréquentes et régulières) si le dôme de lave en question est encore actif. La question se pose tout simplement à la lecture des données du MIROVA, qui montrent que, début janvier, le sommet de l'édifice a été la source d'un rayonnement thermique modéré pendant plusieurs jours. Il n'est pas impossible que cela corresponde à la phase d'extrusion de ce nouveau dôme, dont la taille est vraiment petite (70 m de haut et forcément moins de 200m de large, puisque c'est le diamètre max du cratère). Mais depuis lors le MIROVA n'a plus relevé de signaux sur l'édifice, ce qui pourrait s'expliquer par la fin de la phase d'extrusion.

Un petit groupe de signaux thermiques fin décembre-début janvier pourrait correspondre au moment où le dôme a été produit. Image: MIROVA

Sources: AVO/USGS; LANDSAT 8-NASA/USGS
Pacaya, Guatemala, 2552 m

Depuis quelques temps les images prisent par la webcam installée du côté de San Vincente Pacaya montrent, la nuit (quand il n'y a pas de nuages...), une incandescence un peu plus forte que celle habituellement observée dans le cratère sommital. On sait que la dernière séquence éruptive (été 2015- courant 2016), strombolienne très faible, a édifié progressivement un nouveau cône dans le cratère. Des images ajoutées courant janvier sur youtube (mais dont la date de prise de vue n'est pas précisée, malheureusement) montrent une activité similaire à celle que j'avais décrite en décembre dernier: un dégazage à haute température au sommet du nouveau cône intracratèrique, pulsant, signe que la colonne de magma n'était pas loin sous la surface, mais dans des conditions non favorables à sa remontée jusqu'en surface ("son éruption" comme on dit).

Incandescence au sommet du Pacaya un peu plus forte que celle habituellement observée. Image: INSIVUMEH; USAID; Michigan Tech

Les derniers bulletins de l'INSIVUMEH confirment des modifications de l'activité interne à l'édifice avec la présence de phases de trémor, que les volcanologues guatémaltèques associées au mouvement ascendant de la colonne magmatique. Les bulletins font état de "Pulsos incandescentes", comprenez: "projections de fragments incandescents".
Une activité strombolienne, faible, similaire à celle de la phase précédente, serait donc de retour depuis quelques jours au sommet du Pacaya. En cherchant un peu (pas mal, même) sur le web, j'ai finit par trouver une image prise là encore récemment par deux globe-trotters, Benoît Schnelli et Tessalia  Wyss qui ont entamé un long périple en vélo, en partant d'Anchorage pour tenter de rallier Ushuaïa.
Fin décembre 2016 ils étaient encore au Mexique mais sont passés au Guatemala courant janvier. Il se trouve qu'ils ont fait l'ascension du Pacaya (pas en vélo, je vous rassure) fin janvier ou début février, et qu'ils ont shooté cette image:

Une photo publiée par benoit.schnelli (@benoitschnelli) le



La situation est à suivre car avec le retour d'une activité éruptive sur ce volcan, c'est la question de son évolution à court et moyen terme qui se pose: soit elle reste stable puis s'arrête, soit elle augmente progressivement, ce qui, historiquement, a pu donner des fontaines de lave et des coulées,avant de s'arrêter.
Bref: une situation à suivre, évidemment.

Mise à jour, 07 février; 06h56

L'activité sur le cône intracratèrique est bien visible la nuit, et génère toujours une forte incandescence. Elle a déjà modifié de manière importante la morphologie du cône construit à l'intérieur du cratère du Cône Mac Kenney: il est maintenant parfaitement visible sur les images de la webcam.



Sources: Schnellyss.com (à qui j'en profite pour souhaiter bon courage pour la suite de cette belle aventure); INSIVUMEH/USAID/Michigan Tech

Kilauea, Etats-Unis, 1222 m

L'activité n'a pas changé globalement, mais la situation au niveau de la (fabuleuse) cascade de lave qui plonge dans l'océan a évolué. Tout d'abord la morphologie du trait de côte autour de la cascade change progressivement car l'effondrement du delta de lave fin décembre se traduit par une instabilité chronique des falaises formées par l'événement. Ainsi des morceaux, plus ou moins volumineux, de falaises côtières s'effondrent de temps à autres dans l'eau. Le spectacle est impressionnant, et n'empêche pas les tours opérateurs de continuer d'emmener des touristes observer le phénomène. Ni les pilotes ni leurs clients ne semblent vraiment se rendre compte qu'il sont un poil trop près, dans la zone de retombée potentielle des blocs projetés lors de l'impact dans l'eau. 100 m plus loin, le risque serait très diminué et le spectacle serait tout aussi impressionnant...


Les volcanologues de l'HVO ont aussi le petit coup d'adrénaline avec l'effondrement ci-dessus. Mais eux étaient à proximité, sur la falaise, pour surveiller l'écartement des fissures qui sont le signe avant-coureurs de tels effondrements, afin de tenter de quantifier ce risque.
Ils avaient commencé à filmer une fissure et s'étaient éloignés lorsque....


Ils observaient l'évolution de cette fissure depuis déjà plusieurs jours mais ils ont été surpris par l'absence de signal marquant l'imminence de l'effondrement lorsqu'ils étaient sur place: le morceau s'est détaché, point. La fissure qui était surveillée s'est élargit d'un coup d'environ 25 cm, passant de 75 cm à 1 m de large suite à l'effondrement.

Une autre image est interessante: produite par l'HVO elle montre que le débit de la cascade de lave s'amenuise progressivement. Il semble que l'effondrement du delta de lave fin 2016 ait été le point de départ de la vidange du réseau de tunnels de lave, qui cours depuis l'évent 61 G, au pied du Pu'u O'o jusqu'à la côte.

Progressive vidange des tunnels de lave du "champ de lave 61G". Images: HVO/USGS

Pour l'instant les coulées ne sont visibles en surface qu'à proximité du Pu'u O'o, au niveau de la nouvelle branche du champ de lave 61 G, qui a commencé à se former suite au breakout de novembre 2016 et poursuit sa lente progression.

Les lacs de lave sont toujours présents et ne connaissent pas d'évolution anormale.

Sources: HVO/USGS; Lava Ocean Tour

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