5 mai 2017

Activité en forte hausse au Fuego (Mis à jour x 2)

Après une quinzaine de jours d'activité modérée et stable il semble que le 4ème paroxysme de l'année 2017 soit dans ses prémices. En effet l'INSIVUMEH a commencé d'enregistrer une hausse du trémor associé, en surface, à une hausse significative de l'activité éruptive.
Elle a commencé le 02 mai en cours ou en fin de journée avec l'apparition d'une coulée de lave sur le versant sud-est (ravine las Lajas), au départ peu alimentée. A ce moment-là l'activité explosive (strombolienne) était encore faible-modérée avec des explosions bien séparées, relativement fréquentes.





Puis, à partir du 3 mai elle est montée en puissance avec une activité explosive bien plus intense au sommet et une autre coulée qui a commencé à descendre dans la ravine Santa Teresa (versant ouest). Le tout se voit bien sur le time-lapse ci-dessous, réalisé à partir des images prisent le 04 mai au matin par la webcam installée à l'observatoire (au pied du versant sud-ouest), qu'il suffit de comparer avec le time-lapse ci-dessus. Ce matin les coulées atteignent environ 2000 m de long et, pour le moment, aucun écoulement pyroclastique associé n'a été décrit*. Au sommet il semble que de petites fontaines de lave soient présentes.





L'activité explosive alimente un panache de cendres permanent qui, même s'il est un peu dilué, génère des chutes de cendres sur les communautés qui vivent sous le vent, à savoir, comme très souvent, La Morelia, Panimaché, Santa Sofia, toutes situées au sud-ouest.

Pour l'heure la situation ne nécessite pas d’évacuations préventives et aucune conséquence critique n'est décrite par le CONRED ou l'INSIVUMEH. Deux choses sont toutefois surveillées: la descente de coulées de boue (lahars) car il y a des passages pluvieux et la mise en place d'écoulements pyroclastiques. En attendant le spectacle reste fantastique!

L'activité explosive sommitales (projections) et l'effusion latérale (ici l'une des coulées, probablement celle de l'ouest). Image: CONRED


* pour mémoire: les coulées de lave peuvent générer des écoulements pyroclastiques ("nuées ardentes")  dans certaines circonstances. Ici c'est la très forte pente sur laquelle progressent les coulées, et le substrat sablonneux et instable (cendres et lappilis de l'activité explosive) qui favorisent leur instabilité et leur effondrement sous forme de nuées.

Mise à jour, 19h55

Ce qui était possible s'est finalement produit: une partie des coulées de lave, trop instable, s'est effectivement effondrée et a formé d'imposants écoulements pyroclastiques en tout début de journée. Très spectaculaires, ils se sont mis en place dans plusieurs ravines, essentiellement la Santa Teresa à l'ouest (où se trouve l'une des coulées) et les ravines Las Lajas à l'est (où descend l'autre coulée de lave). Certains se sont approchés de zones habitées, comme Panimaché 1 et San Pedro Yepocapa sur le versant ouest d'où ont été prises les photos ci-dessous.

Un écoulement pyroclastique descend dans la ravine Santa Teresa en début de journée, et bifurque vers le sud-ouest (à droite de l'image). Vue depuis les environs de Yepocapa. Image: Antonio Ixcot

Très spectaculaire écoulement pyroclastique dans la ravine Santa Teresa. Image: auteur inconnu, via CONRED

Cette phase intense a empli l'atmosphère de cendres et généré une situation suffisamment inquiétante pour que les autorités décident d'évacuer les quelques 300 personnes qui résident à Panimaché 1, qui ont été déplacées vers Santa Lucia Cotumalguapa, environ 12 km plus au sud-ouest. Une dizaine d'écoles sont aussi restées fermées aujourd'hui.


Une ambiance empoussiérée à cause de l'activité explosive et des écoulements pyroclastiques: Image: CONRED
La forte activité et les écoulements pyroclastique ont saupoudré les alentours d'une fine perllicule de cendres. Image: CONRED

A plusieurs reprises la webcam de l'INSIVUMEH installée à Panimaché s'est retrouvée encombrée des cendres et a du être nettoyée.

Un peu trop de cendres, et la webcam est aveugle....et nous aussi. Image: INSIVUMEH/Michigan Tech/USAID

Mise à jour 06 mai, 08h04

L'activité est maintenant sur son déclin, après près de 24 h d'une activité vraiment impressionnante, décrite par l'INSIVUMEH et le CONRED comme la plus violente des 5 dernières années. L'INSIVUMEH la catalogue, me semble-t-il à tord, comme "Vulcanienne", probablement sur la simple base de la base de l'intensité pu commune de l'activité (dont le VEI a déjà été estimé à 3) et sur le fait qu'il y ait eu des écoulements pyroclastiques et de grandes quantités de cendres. Or l'activité vulcanienne ne se décrit pas par une activité explosive continue ou quasi-continue mais par des explosions bien séparées et violentes, avec parfois des écoulements pyroclastiques, mais pas de coulées de lave fluides.
La crise que viennent de subir les habitants proches de l'édifice est plutôt un strombolien très intense avec des écoulements pyroclastiques secondaires accidentels.*

Le personnel du CONRED, qui patrouille partout autour du volcan pour voir comment se déroule la situation et pour aider le cas échéant, est allé voir le dépôt des écoulements pyroclastiques mis en place dans la ravine Santa Teresa: l'ambiance est impressionnante, même s'il me semble évident que le personnel en question à pris un risque très (peut-être trop) élevé lors de cette observation, ne pouvant savoir si les coulées de lave, toujours actives à ce moment-là, étaient ou non suffisamment stables.

La partie aval de la ravine Santa Teresa, emplie du dépôts des écoulements pyroclastiques du 05 mai: une ambiance spectaculaire! Image: CONRED

Ces images montrent une ambiance un peu étrange: quand on regarde les bordures de l'écoulement, et même dans le dépôt, la végétation ne semble avoir été que peu ou pas brulée, mais seulement recouverte de cendres. A droite de la photo ci-dessus, un arbre dans le dépôt même a toujours ses feuilles! Cela semble indiquer une mobilité moins grande de l'écoulement que ceux produit lors d'éruptions violemment explosives (à magma plus visqueux) et/ou aux effondrements de dômes de lave. Le fait qu'il n'y ait pas de trace de très haute températures amène logiquement à la conclusion que la température dans l'écoulement ne devait pas être élevée. Du coup j'en viens à me poser la question: quel matériau constitué ce dépôt? Est-ce celui des coulées de lave, qui se seraient effondrées pour former les écoulements? Ou est-ce un dépôt plus ancien (cendres, blocs etc), situé dans la partie haute du volcan et déstabilisé par l'éruption, qui serait parti en poussières puis aurait dévalé la pente? Ou est-ce un mélange des deux (coulée plus dépôts sous-jacent?): la question reste ouverte.
Maintenant que la crise est terminée l'aléa volcanique qui risque de poser le plus de problèmes, vue la quantité de dépôts, est celui des coulées de boue (lahars).


Sources: NSIVUMEH/Michigan Tech/USAID; CONRED; Greg Waite; CONRED

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire